La Côte-d'Ivoire
Un Etat-CEDEAO
Ernest Foua de Saint Sauveur*
*Ernest Foua de Saint Sauveur est journaliste et écrivain ivoirien.
Quand on parle d'intégration en Afrique de l'Ouest, on pense immédiatement à la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Créée le 28 mai 1975 à Lagos (Nigeria), cette grande famille est composée de quinze nations regroupant 250 millions d'habitants : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, le Ghana, la Guinée, le Mali, le Sénégal, le Togo, le Nigeria, le Niger, la Gambie, le Cap-Vert, la Guinée-Bissau, le Libéria et la Sierra Leone.
Portée sur les fonts baptismaux pour promouvoir l'intégration économique de l'Afrique de l'Ouest et faire de cette région un marché viable et concurrentiel dans le vaste réseau des échanges en Afrique et dans le monde, cette institution presque trentenaire a évolué au rythme des bouleversements, des soubresauts politiques et sociaux que l'Afrique a connus depuis la période des indépendances. C'est-à-dire laborieusement. Si laborieusement , qu’aujourd’hui encore, l'objectif primordial de la CEDEAO 1 de parvenir à l'intégration, se dessine toujours en pointillé. La libéralisation des échanges n'est pas encore opérationnelle, le commerce intra- communautaire reste faible, le tarif extérieur et les politiques économiques et financières sont loin d'être harmonisés. Dans ce décor de grisaille, l'institution communautaire ouest- africaine semble faire quelques progrès dans certains domaines, en particulier, la libre circulation des personnes, le maintien de la paix et la sécurité régionale.
A l'heure du bilan, les responsables de l'organisation sous-régionale qui sont conscients que l'intégration de l'Afrique de l'Ouest est une nécessité vitale, en sont encore à énumérer les obstacles les plus récurrents :
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l'instabilité politique ;
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la mauvaise gouvernance ;
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la faiblesse et la diversification insuffisante des économies nationales ;
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la contribution irrégulière des Etats aux budgets de fonctionnement de cette institution.
Si l'organisation ouest - africaine piétine encore, c’est parce que de Dakar à Lagos, en passant par Abidjan et Lomé, 250 millions d’habitants recherchent désespérément les voies de la prospérité et de développement partagé, c’est à cause d’un trop lourd déficit démographique dans les états membres de la CEDEAO, et l'omniprésence de l’Etat dans l'économie, au détriment du secteur privé.
Ce tableau, quelque peu négatif, n’incite pas à l’optimisme quant à la survie et à la viabilité de la CEDEAO, mais cela n’empêche toutefois pas de voir dans l’intégration régionale, la solution idoine qui permettrait aux états et aux populations de la région, de circonscrire et de se protéger contre les effets néfastes de la mondialisation. Entretenir et bâtir ensemble une communauté ouest-africaine plus unie et prospère et évoluer de manière disparate dans l’exiguïté et l’enfermement des marchés nationaux intérieurs, les nations de l’Afrique de l’Ouest ont-elles vraiment le choix ? Plus que de vaincre les lourdeurs administratives et les insuffisances en matière de démocratie, il s’agit donc pour les dirigeants africains d’effectuer un choix politique hardi allant dans le sens d’une ouverture sur l’extérieur.
En scrutant l’espace régional ouest-africain, un pays a choisi cette option de l’ouverture et de l’intégration dans sa nationalité des ressortissants des états environnants ; un pays qui, comptant le plus fort taux d’immigrés au monde - le chiffre officiel est de 26 % - a longtemps figuré, aux yeux des observateurs, comme un État-CEDEAO : c’est-à-dire un modèle d’intégration, réalisant une synthèse harmonieuse des couleurs et des réalités nationales dans les 15 nations de la sous région ouest- africaine. Cet État, c’est la Côte d’Ivoire.
L’État-CEDEAO et le poids de l’histoire
Sa configuration d’État-CEDEAO, la Côte-d’Ivoire la doit à l’histoire d’abord, et à la volonté d’un homme d’exception, Félix Houphouët-Boigny, père fondateur de la nation ivoirienne. Identifié très tôt comme étant un espace essentiel dans sa stratégie d’implantation et d’exploitation, la Côte d’Ivoire va bénéficier de la part du colonisateur français d’une attention particulière. Un plan de développement dense (création du port d’Abidjan, construction de la voie ferrée Abidjan Niger) est mis en chantier, pour lequel une forte immigration de personnes venant des pays de la sous région ouest-africaine va être sollicitée. Les contingents de travailleurs burkinabés, maliens, dahoméens et Guinéens vont être ainsi déversés dans les campagnes et les villes de la Côte-d’Ivoire.
Tous les politologues et autres analystes de l’organisation des états sont d’accord : sans être un panafricaniste déclaré, Houphouët est celui qui a le mieux traduit en actes le panafricanisme, bien que le concepteur de cette idéologie d’unification et de rassemblement des peuples africains soit le docteur Kwame Nkrumah, premier chef d’État du Ghana. En effet, après avoir créé en 1946, à Bamako (Mali), le Rassemblement Démocratique Africain (RDA), un parti transnational, Félix Houphouët-Boigny s’attelle, dès l’indépendance de la Côte d’Ivoire en 1960, à faire de cette ancienne colonie française un « pays de l’hospitalité », « la terre d’espérance » que proclame l’Abidjanaise, l’hymne national ivoirien.
De la poussière d’ethnie - une soixantaine, selon les spécialistes - qui peuplent l’espace territorial, il entreprendra de faire une nation unie et solidaire, en recourant à une administration judicieuse et en favorisant les échanges et les mélanges, au niveau des hommes et des cultures. Dans le même temps, il se préoccupe de l’intégration harmonieuse, dans la communauté ivoirienne, des ressortissants des pays de la sous-région venus s’établir et travailler. Les lois que le Parlement vote sous son influence (Code de la nationalité basée sur le droit du sol, loi foncière et droit de vote), y contribue grandement.
Dans une excellente biographie publiée récemment aux éditions du Cerap-Abidjan, le journaliste et critique littéraire ivoirien, Frédéric Grah Mel écrit : « dès 1944, l’arrivée d’Houphouët sur la scène publique est motivée et conditionnée par la récurrente opposition entre autochtones et allochtones de Côte-d’Ivoire, et il n’a eu de cesse de veiller à une entente cordiale des deux entités et surtout d’amener chaque partie a donné le meilleur d’elle-même au profit du pays ».
Fortement ancrée dans l’idée que le salut de l’Afrique réside dans la coopération entre les états et dans l’intégration des peuples du continent, Houphouët est à la base de la création de toutes les organisations de dimension africaine : Organisation de l’Unité Africaine (OUA), devenue aujourd’hui l’Union Africaine (UA) ; ou sous régionales : Organisations Communes Africaines et Malgaches (OCAM), Conseil de l’Entente et Communauté Economique de l’Afrique de l’Ouest (CEAO), dans le prolongement est aujourd’hui la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Unité, entente, solidarité et intégration peuvent être perçues comme les maîtres mots de son action politique, à la tête de la Côte d’Ivoire et en Afrique. Il était convaincu que c’était là, la seule voie pour les nations africaines de sortir du sous-développement ; il n’hésitera pas, dans les années 1980, a solliciter de ses compatriotes qu’ils partagent son idée d’accorder la double nationalité aux ressortissants ouest-africains établis en Côte d’Ivoire. Malheureusement, il essuiera un refus net des ivoiriens. Et ce sera là, nous disent les commentateurs de la scène politique ivoirienne, la seule fois où, dans l’élan qu’il a impulsé par la nation, le « Vieux » n’a pas obtenu l’adhésion de son peuple.
Ce revers, s’il désappointe le « Sage de Yamoussoukro », ne lui fera pas renoncer à son dessein de constituer une communauté nationale compénétrée, au sein de laquelle allogènes et allochtones ou encore ivoiriens d’origine et ivoiriens d’adoption, coexisteront et oeuvreront, dans une synergie heureuse, à bâtir une nation prospère. Sous son égide, en tout cas, la Côte- d’Ivoire, avec le plus fort taux d’immigration au monde, fera longtemps figure de vitrine de l’intégration en Afrique de l’Ouest. Aujourd’hui, cette vitrine a volé en éclats : la Côte d’Ivoire est dans la tourmente, mais c’est toute la sous région ouest africaine qui est menacée, politiquement, économiquement et socialement.
Politiquement
Comme on le sait, dès le début de la rébellion menée par des soldats déserteurs des Forces Armées Nationales de Côte-d’Ivoire (FANCI), le 19 décembre 2002, le gouvernement n’a pas hésité à accuser certains états voisins, ceux du Nord, notamment (Burkina, Mali et Guinée), et le Liberia, à l’ouest d’être impliqués. Des accusations qui contribueront à éloigner Abidjan de Ouagadougou, Bamako, Conakry et Monrovia. Depuis lors, bien qu’une intense activité diplomatique, menée principalement par la CEDEAO, a détendu plus ou moins l’atmosphère entre les différentes capitales, on ne peut pas dire que c’est le grand amour entre Laurent Gbagbo, le chef de l’État ivoirien, et son homologue burkinabé, Blaise Compaoré. Et ce, en dépit des nombreuses médiations entreprises par leurs pairs africains en vue de les raccommoder. Il est notoirement connu que le Burkina a servi de rampe de lancement aux rebelles qui ont violemment secoué le pouvoir d’Abidjan.
Economiquement
Le rôle moteur de la Côte d’Ivoire en Afrique occidentale est unanimement reconnu. Ce pays, qui représente plus de 60 % du flux monétaire de l’Union Economique et Monétaire Ouest- Africaine (UEMOA) est, incontestablement, le poumon de l’économie régionale. Avec ses ports de San Pedro et Abidjan qui sont, pour ses voisins enclavés de l’hinterland, les débouchés essentiels sur la mer, le pays d’Houphouët apparaît comme un pôle majeur en Afrique de l’Ouest. On comprend alors que la crise qui l’affecte depuis de longs mois, ait eu de graves répercussions dans les états frontaliers. Analysant la crise ivoirienne, Amadou Toumani Touré, le numéro un malien, a relevé l’impact de celles-ci sur l’économie de son pays. Ses appels au retour de la paix en Côte-d’Ivoire, relève moins d’un souci altruiste à l’égard de son voisin que d’une volonté bien légitime d’assurer la survie de son propre peuple.
Socialement
Un tiers de la population de la Côte d’Ivoire, soit environ 4 millions de personnes, selon les estimations officielles, sont d’origine étrangère. Depuis la signature, en mai 2003, du cessez-le- feu intégral par les armées belligérantes, la crise ivoirienne, d’abord armée puis exclusivement politique, n’a cessé de perturber les rapports intercommunautaires.
En effet, certaines communautés étrangères (maliennes, Burkinabée, et guinéennes, notamment) dont les états ont été accusés par Abidjan de soutenir la rébellion ivoirienne, ne sont plus en odeur de sainteté auprès d’une frange de la population. Depuis le déclenchement de la crise, le 19 septembre 2002, les gouvernements burkinabé et malien ont eu, à plusieurs reprises, a déplorer les exactions et tueries perpétrées sur leurs compatriotes, en zone gouvernementale, par les forces de l’ordre et les milices proches du président Gbagbo.
Pour donner la pleine mesure de la tension ambiante, il convient de relever qu’avant le déclenchement de la rébellion, la scène sociale était régulièrement agitée de conflits sanglants ayant pour origine la terre et son mode d’exploitation, et qui opposaient, dans certaines zones du sud-ouest, de l’ouest et du centre-ouest, les paysans ivoiriens et leurs hôtes étrangers, surtout ceux des pays limitrophes.
Le piège de l’ivoirité
A la mort du président Houphouët, la configuration d’État compénétré qu’il a donné à la Côte- d’Ivoire, a été, plus ou moins ouvertement, remise en cause par ses successeurs pour servir leurs desseins politiques. C’est d’abord Henry Konan Bédié, celui dont il l’a fait son dauphin constitutionnel, qui, sans annoncer franchement la couleur, va s’évertuer, au cours des six années qu’il passe à la tête du pays, à prendre ses distances avec le « père de la nation ». Pour imprimer ses marques à l’État, il s’engage dans une série d’actes auxquels la presse locale va appliquer le néologisme de « déhouphouétisation »: il supprime la Pensée du jour, les cinq apophtègmes du président Houphouët que les médias publics avaient pris l’habitude de diffuser quotidiennement ; il rase entièrement et rebâti à son goût la résidence de fonction de son illustre prédécesseur.
Ces mesures ont sont suffisamment indicatives, mais c’est dans la promotion qu’il fait, à partir de 1994, de la théorie ségrégationniste de l’ivoirité, que Bédié démontrera son rejet des valeurs d’ouverture et d’intégration, chères à Houphouët. Le fondement de cette théorie, c’est la discrimination, la distinction entre Ivoiriens d’origine, Ivoiriens 100 % et Ivoiriens d’adoption, ivoiriens de circonstance, selon la terminologie des journaux de l’époque.
C’est le 26 août 1995, devant la convention de son parti, Parti Démocratique de Côte- d’Ivoire Rassemblement Démocratique Africain (PDCI-RDA), à Yamoussoukro, Henri Konan Bédié éclaire l’opinion sur sa conception de l’ivoirité : « à travers une unité de la nation et de ses conditions essentielles : l’impartialité de l’État, le rééquilibrage entre les régions, la régionalisation, la réalisation d’une société moins inégalitaire et plus solidaire, ce que nous poursuivons, c’est bien évidemment l’affirmation de notre personnalité culturelle, l’épanouissement de l’homme ivoirien dans ce qui fait sa spécificité, ce que l’on peut appeler son ivoirité ».
Sur cette base, il est vrai, on peut difficilement trouver à redire sur l’ivoirité, mais on comprendra vite, à travers les piques qui lui lance, et surtout l’inculpation pour fraude sur la nationalité dont il l’accable alors, que c’est Alassane Dramane Ouatara, ancien premier ministre d’Houphouët et candidat déclaré à l’élection présidentielle de 1995, qui est la cible principale de l’offensive ivoiritaire du Sphinx de Daoukro.
Lorsque Robert Gueï, le 24 décembre 1999, chaussé de ses bottes de Général de brigade, fait irruption de façon martiale dans les allées du pouvoir pour en chasser le président élu, Henri Konan Bédié, il donne l’impression d’être en faveur de l’admission dans le jeu électoral ivoirien de l’ancien directeur général adjoint du Fonds Monétaire International (FMI) , Alassane Dramane Ouatara.
Mais, quand à l’approche des échéances électorales de 2000 auxquelles il a décidé de prendre part et après avoir déclaré, dans un premier temps, qu’il n’était pas intéressé, on entendra le général putschiste dénoncer les politiciens « qui se promènent avec un double certificat de nationalité : l’un dans la poche droite et l’autre dans la poche gauche ». Non content d’avoir contribué à éliminer de la course à la présidentielle de 2000 le chef du Rassemblement des Républicains (RDR) Alassane Dramane Ouatara 2, Robert Gueï en cautionnant la constitution de 2000 qui exclut du fauteuil présidentiel les nationaux qui ne peuvent alléguer d’être « ivoiriens de père et de mère, eux-mêmes ivoiriens de naissance », a pratiqué sans le vouloir, une forte entaille dans la toile intégrationniste patiemment tissée par le « Sage de Yamoussoukro » pour former une nation cosmopolite.
Élu à la magistrature suprême, en octobre 2000, dans des conditions que lui-même a qualifiées de calamiteuses, Laurent Gbagbo avait l’opportunité de réparer la fracture ainsi opérée dans le tissu social. Mais l’opposant farouche, pendant 30 ans, au « père de la nation », qui a toujours dédaigné de compter parmi les héritiers de celui-ci, avec une occasion de prendre sa revanche sur un homme qui, pour paraphraser son camarade de parti, Mamadou Koulibaly, président de l’Assemblée nationale, renonçant ainsi à perpétuer son œuvre et sa mémoire. Aussi va-t-il, à son tour, s’inscrire de façon subtile, dans le registre de l’ivoirité. La politique qu’il met en œuvre pour réaliser l’identification des populations, fait obligation à tout citoyen de prouver sa nationalité en étant à même de localiser son visage sur le territoire de la Côte d’Ivoire.
Cette politique d’identification par trop restrictive, l’ivoirité qui discrimine au sein des populations ivoiriennes, et ce flagrant déficit démocratique qui a laissé sur la touche, lors de la présidentielle de 2000, les poids-lourds de la scène politique ivoirienne, Bédié et Ouatara, seront, entre autres, les raisons que la rébellion avancera pour se justifier d’avoir, comme s’en plaint Laurent Gbagbo, « porter le fer dans le sein de la mère patrie ».
Une intégration confisquée
Comme nous l’avons vu, tout au long de cette analyse, l’intégration en Afrique de l’Ouest a un cadre institutionnel et administratif, la CEDEAO, et un cadre fonctionnel ou d’expérimentation, la Côte- d’Ivoire. Il s’agit de la Côte-d’Ivoire de Félix Houphouët-Boigny, le « Sage de Yamoussoukro » qui, par son charisme, son génie politique et humain a su fédérer autour de lui, toutes les régions, toutes les ethnies et toutes les religions. Cette Côte d’Ivoire là, se présente comme un modèle d’ouverture et de tolérance pour tous les ivoiriens et pour toutes les personnes d’origine étrangère qui avait choisi de vivre et de travailler sur cette terre, et d’en faire leur patrie d’élection.
La Côte-d’Ivoire actuelle, pourtant administrée par un dirigeant prétendument d’obédience socialiste, semble avoir tourné le dos à cette heureuse option. Qu’ils soient Levantins, africains ou européens, jamais les étrangers n’ont été autant malmenés en Côte-d’Ivoire que sous le mandat de Gbagbo. Le pays souffre, dans l’opinion internationale, d’une sombre image ; une image que les meurtres, ces derniers mois, du correspondant français de RFI Jean Hélène, et du journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer, imputés aux partisans ou proches du chef de l’État ivoirien, n’amélioreront sûrement pas.
En janvier 2003, après les négociations de Marcoussis où la classe politique ivoirienne, y compris les chefs de la rébellion, s’est retrouvée, à l’initiative de la France, Laurent Gbagbo a créé - une première en Côte-d’Ivoire - un ministère de l’intégration africaine. Est-ce pour faire oublier cette image négative ? On peut le penser !
Comme on peut aussi penser que cette initiative lui a été dictée par les tuteurs français, comme le laisse entendre son épouse, la députée Simone Gbagbo, lorsqu’elle se plaint en juin 2003, devant Seydou Diarra :
« on veut transformer la Côte-d’Ivoire en un Etat-CEDEAO, dans lequel les ivoiriens n’auront pas le droit d’avoir leur spécificité, d’organiser leur souveraineté, j’emprunterai même à d’autres auteurs, le terme d’ivoirité ».
À cette heure, au moment où les députés planchent sur les textes de lois répertoriées par les accords d’Accra II et de Marcoussis, Simone Gbagbo et ses pairs du groupe parlementaire du Front Populaire Ivoirien (FPI) à l’Assemblée nationale, semblent avoir fait une concession : ils sont prêts à faire un geste en direction des pays frères de l’Afrique de l’Ouest, à condition que leurs gouvernements respectifs s’engagent dans la voie de la réciprocité.
Moralité, si l’on peut parler ainsi de la crise ivoirienne : hier à redouter du refuge pour les étrangers, ouvert, hospitalier et accueillant, la Côte-d’Ivoire actuelle, celle des socialistes, si elle reste potentiellement le lieu d’expérimentation avérée de l’intégration africaine, n’entend plus ouvrir les bras sans condition aux immigrés de la sous région ouest-africaine.
E. F. de S. S.
Notes:
(1) Cet article a été écrit par l'auteur avant les évènements trgiques du début du mois de novembre 2004.
(2) Le président Houphouët, est allé chercher, en 1990, Alassane Ouatara au FMI, pour en faire son premier ministre. Il l'avait présenté à la nation comme un authentique fils de la C$ote-d'Ivoire, descendant de la dynastie des fondateurs du royaume de Kong, dans le Nord ivoirien.